Fauve Hautot « J’aime aller là où je suis en difficulté ! »
Figure emblématique de l’émission Danse avec les stars sur TF1, la Française a accepté de revenir dans le jury pour cette saison 13 qui vient de commencer. À 37 ans, elle se sent plus légitime dans ce rôle de juge et évoque cette passion pour la danse qui ne l’a plus quittée depuis sa plus tendre enfance.
Pas besoin de la chercher sur le parquet de Danse avec les stars ! Elle n’y fera que quelques apparitions pendant la saison 13. À la demande de TF1, Fauve Hautot a en effet accepté d’intégrer le jury, aux côtés de Chris Marques, Jean-Marc Généreux et Mel Charlot. Il n’y aura donc pas de quatrième victoire consécutive pour celle qui s’est imposée en 2019, 2021 et 2022, avec Sami El Gueddari, Tayc et Billy Crawford. Mais, à 37 ans, « Fauvette » – comme l’appelle affectueusement Camille Combal – reste, avec Denitsa Ikonomova, la reine incontestée sur ce parquet. On se souvient encore de ce fox-trot avec Emmanuel Moire, lors de la troisième saison, sur la chanson, Sois tranquille, un hommage au frère jumeau disparu du chanteur. C’était en 2012, année de sa deuxième apparition dans l’émission et de sa première victoire…
Désormais, Fauve Hautot fait quasiment partie des meubles. En treize ans, elle a séduit le public par sa gentillesse, par sa douceur, mais aussi par ce charisme qui en fait l’une des personnalités les plus appréciées du PAF. Mais la Française est aussi une chorégraphe hors pair, une main de fer dans un gant de velours, capable de bonifier ses partenaires et de les amener à se sublimer dès qu’ils se retrouvent sur la piste. Pourquoi avoir décidé de retourner de l’autre côté du miroir ? Nous avons téléphoné à Fauve pour le savoir. Elle a le tutoiement facile. Ponctue ses phrases de « tu vois » et « et cætera ». Mais elle reste d’une simplicité et d’une humilité incroyables. Où l’on découvre une femme pétrie de doutes qui ne poursuit qu’un seul objectif dans l’existence : devenir la meilleure personne possible, dans sa vie personnelle comme dans sa carrière.
OFF : Après une première expérience de 2015 à 2017, pourquoi avez accepté de revenir dans le jury de l’émission près de dix ans plus tard ?
Fauve Hautot : DALS est une émission que j’aime beaucoup, tout simplement parce que c’est la seule consacrée à la danse – ma passion depuis que je suis enfant. Mais, dans ma tête, il était clair qu’après ma saison avec Billy Crawford (ndlr. en 2022), j’avais fait mon temps en tant que danseuse et que je souhaitais faire autre chose. Pourtant, lorsqu’on m’a proposé d’être dans le jury, j’ai tout de suite dit oui. À chaque fois que je retourne dans cette émission, c’est pour y apprendre quelque chose! Or, la première fois, je ne m’étais pas sentie totalement légitime. J’avais 28 ans, j’avais moins de confiance… L’exercice s’est révélé difficile. Aujourd’hui, j’ai plus d’expérience, je connais mieux la définition de ce qu’est la danse pour moi. J’ai envie d’aborder cette aventure avec plus de sérénité et de trouver les mots justes pour raconter ce qu’il y a à l’intérieur de ma tête. À l’âge que j’ai, j’ai envie de ça : développer un propos sur la danse.
« Dans ma tête, il était clair qu’après ma saison avec Billy, j’avais fait mon temps en tant que danseuse. »
OFF : Est-ce difficile de se retrouver face à ses copains et de les juger ?
FH : C’était un peu compliqué au début, parce que je ne voulais froisser personne… Aujourd’hui, ce n’est plus un souci. Je travaille avec tous ces gens depuis des années: ils me connaissent, ils savent que je suis une personne plutôt douce et sympathique. Je ne vais pas entrer dans un rôle qui ne me correspond pas. Je suis là surtout pour donner des tips et faire évoluer chaque couple pour les amener aux portes de la finale.
OFF : Le fait d’avoir gagné trois fois de suite vous a-t-il aussi poussée à passer la main ?
FH : Ce n’est pas tant l’histoire d’avoir gagné ou pas… J’étais ravie, parce que le travail avait été récompensé. Mais je suis quelqu’un de curieux. J’aime aller là où je suis en difficulté, là où ça me fait peur. J’avais simplement envie d’aller voir ailleurs et d’expérimenter d’autres choses. C’est peut-être moins médatisé, mais je danse tout le temps. Et se mettre en danger ailleurs, c’est s’offrir la possibilité de grandir aussi !
OFF : Qu’est-ce que DALS vous a apporté ?
FH : Elle m’a tout apporté. Au niveau humain et artistique, j’ai progressé. Quand on travaille avec des artistes différents, et c’est pour ça que je suis toujours revenue, il y a à chaque fois une autre psychologie, une autre matière à creuser. Sur le plan créatif, la carte blanche à laquelle j’ai accès me permet également de me dépasser. Pendant les trois mois d’émission, je repars de zéro et j’essaie de proposer autre chose que ce qui a été fait. Et puis, la sensation du live est unique, elle te donne une adrénaline de fou. Ce qui est fabuleux, c’est ce moment où tu te connectes au présent: quand tu danses, tu ne penses plus à rien et tu planes… C’est magnifique à vivre !
OFF : Elle vous a aussi offert une certaine notoriété. Comment la gérez-vous ?
FH : Au début, c’était un peu particulier, passer de l’inconnu à un visage plus exposé… Mais, après, c’est une histoire de composition: savoir qui tu es pour pouvoir transmettre la bonne information de qui tu veux être. Cela a été hyper formateur. Je me rends compte que je suis assez centrée comme personne. Cela ne me gêne plus du tout : j’arrive à vivre ma vie comme avant, sans changer mes habitudes, et je fais la part des choses: ce qui est privé reste privé et je laisse le côté pro exposé.
OFF : Vous êtes-vous découvert une vocation de chorégraphe, à force d’en créer des nouvelles chaque semaine ?
FH : Je suis arrivée sur DALS avec l’étiquette d’artiste de danses de salon – un univers très codifié. Mais, au fur et à mesure, je me suis nourrie d’autres choses. J’essaie de toucher à tout. À la base, j’ai une formation de jazz, j’avais aussi fait un peu de contemporain. J’ai suivi des cours de théâtre… J’essaie de rallier tout ça à mes chorégraphies. Si tu compares une chorégraphie de 2011 à une d’aujourd’hui, tu ne vois pas la même danseuse. Tu peux mesurer la progression de l’humaine là-dedans, et ça, j’aime bien.
OFF : Vous l’avez dit, votre spécialité, ce sont plutôt les danses latines. Mais, sur DALS, on se souvient surtout de vos prestations en danse contemporaine… ?
FH : Oui, c’est assez marrant, parce que ce n’est pas une matière que j’ai vraiment étudiée. En fait, la danse contemporaine que je performe vient de ce que j’ai pu apprendre au théâtre. Elle sert à raconter des histoires et à être le plus proche possible de que ce que les personnages vivent et ressentent. Quand je commence une chorégraphie, j’essaie toujours de créer un court-métrage. J’invente mon histoire, je dessine les plans séquences et, à partir de moment-là, je crée du mouvement. C’est con ce que je vais dire, mais le mouvement, chez moi, arrive toujours à la fin.
OFF : Est-ce facile de faire danser des gens qui n’en ont pas l’habitude ? Je ne parle pas de Billy Crawford, hors catégorie, mais plutôt d’Emmanuel Moire ou Sami El Gueddari…
FH : Compliqué, non, parce que passionné ! Mais c’est un travail quotidien. Moi, ce que j’adore, et c’est peut-être pour ça que je ne m’en sors pas si mal (sourire), j’essaie de raconter une histoire à l’autre, de lui expliquer pourquoi il doit faire ce mouvement-là. C’est un peu bête, mais, pour simplifier, c’est comme si tu parlais à un enfant : tu dois le guider et, s’il ne te comprend pas, ça ne marche pas. À toi de trouver les métaphores qui leur permettent de développer un mouvement. Va cueillir une pomme, ramasser un caillou ! Ils comprennent tout de suite où je veux les amener.
OFF : Sur ces treize ans d’émission, existe-t-il des moments plus forts que d’autres ?
FH : Tout est fort, parce que chaque étape est importante. C’est une sorte de chemin. Tu fais une performance, ça passe, c’est coché, tu passes à la suivante… Si tu mets la charrue avant les bœufs, tu es sûr de te planter. L’essentiel, c’est de créer une connexion, une complicité, avec l’autre. Oui, il y a un professeur et un élève, mais il y a surtout un grand respect entre les deux. L’un ne va pas sans l’autre et l’un porte l’autre quand ça ne va pas… C’est ça, mes moments forts !
OFF : Remontons un peu le fil du temps ! Avec une maman prof de danse et un papa passionné par cet art, était-il logique que vous choisissiez cette voie-là ?
FH : Non. Je ne me suis jamais dit: un jour, je serai danseuse ! À un moment donné, j’ai compris que je pouvais accéder à un niveau supérieur en m’entraînant. Mais, franchement, là d’où je viens, il y avait peu de débouchés en danse. J’aurais pu devenir professeur, mais je n’en avais pas conscience, il aurait fallu passer des diplômes… Ma chance, c’est que j’ai commencé à travailler très tôt. À l’âge de 16 ans, j’ai participé à des petits shows dans la région, j’ai gagné un peu d’argent.Et puis, j’ai passé le casting pour une émission sur France 2, le Dancing Show, ce qui m’a permis de partir assez vite en tournée. C’est seulement là, avec les premiers cachets, que j’ai envisagé d’en faire mon métier.
OFF : Vous n’avaz jamais rêvé d’être un petit rat de l’opéra, alors ?
FH : Pas du tout. Je viens de la campagne. Je n’avais pas ces accès-là et Paris me paraissait très loin. Je faisais mon petit bout de chemin en province, je n’avais pas cette ambition. Mais, grâce au Dancing Show, j’ai pu rencontrer Rick Odums (ndlr. Chorégraphe de l’émission). Il a été extraordinaire. Je n’avais pas d’argent pour m’offrir une formation, c’est lui qui m’a payé mes trois ans de cours. Je travaillais aussi le soir pour Dany Brillant. En fait, je crois que j’ai une super bonne étoile. Mais j’ai bossé fort pour réussir. Encore aujourd’hui, je prends des cours, je cherche à progresser tout le temps. Tu dois le faire, parce que le mouvement n’est jamais acquis.
OFF : Peut-on dire que la danse est un apprentissage permanent ?
FH : Oui. Je dirais même que la vie est un apprentissage permanent. Ça marche pour tout, pas que pour la danse. Tu dois toujours essayer de t’améliorer pour devenir meilleur performeur, meilleur ami, meilleur humain…
OFF : Pourquoi les danses latines ? Il y a quelque chose qui vous attirait particulièrement ?
FH : Mes parents pratiquaient les danses de salon et participaient à des compétitions. Nous avons tous suivi le mouvement. Moi, je dansais avec mon frangin, ma sœur cadette était avec un petit jeune dont je ne me rappelle plus le prénom… On mettait la valise de costumes dans le coffre de la voiture et on partait tous ensemble. C’était juste ça, l’idée ! (rires)
OFF : En 2001, vous remportez votre unique titre de championne de France. Quel rapport entretenez-vous avec la compétition ?
FH : Au départ, franchement, j’ai adoré, parce que je progressais. Comme quand tu veux être bon en maths: tu fais tes devoirs pour devenir meilleur. Mais, vers 16-17 ans, ça a commencé à me saoûler. C’est un univers tellement codifié… Je n’avais plus envie d’être comme tout le monde, de m’habiller comme les autres, de me surmaquiller. Je ne correspondais plus à tout ça. Je m’intéressais plus à créer du spectacle qu’à me fighter sur une piste et à faire en sorte que l’angle de mon pied soit bien à 45°. Je n’aime pas la compétition, mais je suis compétitive avec moi-même.
OFF : Vous me disiez que vous dansiez tout le temps… Que faites-vous quand les projecteurs de DALS s’éteignent ?
FH : J’aime bien me recentrer sur la danse. Je peux aller animer un stage avec des gamins qui ont la dalle, chorégraphier pour le cinéma ou le théâtre, donner des workshops… J’imagine ça comme un petit soleil à 1000 branches et je peux faire plein de trucs différents. Ce ne sont pas forcément des choses médiatiques. Mais je ne suis pas en recherche de ça. Je suis plus en recherche de ce qui me nourrit.
OFF : Maxime Dereymez (D’pendanse) et Chris Marques (Alors, on danse ?) ont créé leur propre troupe avec des danseurs de DALS. Vous n’y participez plus: pourquoi ?
FH : J’essaie de rester en dehors de tout ça. DALS me définit, certes, mais pas que… J’aime cette émission et les gens qui y travaillent. Mais j’ai besoin de m’ouvrir à d’autres univers. Se nourrir ailleurs te permet d’évoluer personnellement. Et j’ai cette curiosité pour des choses que j’ignore. Parfois, cela me fait peur, je me retrouve dans des environnements que je ne maîtrise pas, mais j’en ressors à chaque fois enchantée, parce que j’ai rencontré d’autres artistes qui sont devenus des copains, cela t’ouvre d’autres opportunités…
OFF : Vous avez notamment tourné dans des téléfilms pour TF1. Auriez-vous envie d’explorer plus encore cette voie-là ?
FH : C’est un grand oui. (rires) J’adore. C’est une autre forme d’interprétation qui rejoint cette idée de raconter une histoire dans un collectif, de créer un personnage, de changer de costumes. Et, franchement, j’adore ce rapport à la caméra, j’adore jouer…
OFF : Comment vous êtes-vous formée au métier de comédienne ?
FH : Cela remonte à 2017, quand j’ai joué dans la comédie musicale Saturday Night Fever. À l’époque, j’avais une peur bleue de parler fort, de m’exprimer, par manque de confiance. J’avais déjà fait du théâtre quand j’étais petite, avant de me tourner vers la danse. J’ai pris des cours pour avoir des tips et gagner en confiance, j’ai aussi suivi des stages par-ci par-là. Mais, après, c’est du plateau, c’est là que tu apprends le plus.
OFF : Vous parlez beaucoup de doute, de manque de confiance… Comment travaillez-vous cette part de votre personnalité ?
FH : C’est un travail quotidien. Cela passe beaucoup par l’écriture, par l’analyse de soi, Je suis bien entourée, mais j’aime le silence. J’ai besoin de ces moments d’introspection où j’essaie de comprendre d’où viennent mes peurs. Et je me rends compte en fait qu’on se met souvent des barrières tout seul. C’est entre nous et notre tête ! Quand tu te décides finalement à sauter, tu vois qu’il ne t’arrive pas à grand-chose et qu’en fait, ça se passe plutôt bien… (sourire) L’écriture m’aide beaucoup à poser mes peurs et à m’aligner.
OFF : A contrario, dès que vous êtes sur scène, vous devenez solaire… Comment expliquer cette dualité ? FH : Dans la vie, je suis plutôt quelqu’un de simple et calme. Je ne serai jamais celle qui parle fort et qui cherche à se montrer. En revanche, je ressens une immense joie quand je suis sur scène. L’art me nourrit grandement. Parce que j’ai besoin de ça. Il y a l’humain et le performeur.