Dans Le Décor

Maria Mettral: un rayon de Soleil sur les planches

Alors qu’elle termine son mandat de présentatrice météo à la RTS, la comédienne se consacrera désormais uniquement au théâtre. Avec des projets à foison.

Geneve, 13 mai 2024. Portrait de Maria Mettral. © Magali Girardin

Elle incarne ces prochains mois une transgenre dans Drôle de Genre, La Callas dans MasterClass, l’épouse trompée dans L’Autre, ou dans Couple ouvert à deux battants, mais lorsqu’on la rencontre chez elle, elle vient de terminer de faire le ménage, de remplir le frigo et de passer à la pharmacie pour son petit-fils de 15 ans. Elle n’a dormi que ses habituelles cinq heures, mais l’éclat de ses yeux vert pomme n’exprime aucune lassitude. Les projets tourbillonnent autour de ce rayon de soleil qui termine son mandat de présentatrice météo à la RTS sans aucune nostalgie.

Cet été, elle sera la mère (italienne) de la mariée dans un prochain court métrage de Lauriane Gilliéron qui aura l’amour comme sujet, traité de façon grave et fantasque . À son retour, elle jouera ses différentes pièces à Montreux, Vevey, Yverdon ou Genève, où elle sera sur les planches aux côtés de sa fille Lola Gregori et de son mari Christian pour Comme s’il en pleuvait, de Sébastien Thierry. Une aventure qui l’enthousiasme beaucoup, car la famille, chez les Mettral-Gregori, c’est sacré, c’est joyeux, c’est intense et c’est soudé. Les enfants quittent le nid tard, vers leurs 25 ans, et la mère veille, où qu’elle soit, sur son petit monde. À une minute d’entrer sur scène, alors que d’autres prient ou méditent, elle envoie un dernier message à son aîné Sébastien, pour savoir si son dos va mieux, s’il est allé voir l’acupunctrice chinoise. Et Noah, son fils cadet, de rire : si elle était Bulgare, l’acupunctrice, elle n’aurait pas précisé. L’humour chez les Mettral-Gregori est aussi anglais que tarte à la crème, et Maria fait beaucoup rire, parfois malgré elle, son mari aux origines british, et ses enfants. Sa fougue italienne, son impulsivité ? Ou une sorte de maladresse innée, exagérée par sa famille ? Elle répondra que pour casser des verres, il faut commencer par les laver et les ranger, ce qui lui arrive plus souvent qu’aux hommes de son foyer. Les messages passent, ou pas, avec une colère feinte ou passagère. « Pour ce qui est de l’Italie, oui, cette fougue est peut-être due à mes origines, mais je suis Genevoise. On est de là où on naît, où l’on étudie, travaille, tombe amoureuse… Les origines, je les chéris, mais il faut se méfier de liens trop forts et illusoires .» Dans le disque que le duo Aliose a écrit pour elle, avec elle, Malgré les apparences, les auteurs-compositeurs chantent : « Nous ne voulons rien abandonner, mais il le faut. Perdre une part de soi, sinon il est impossible d’aller plus loin. Se défaire de nos peurs, tel est le chemin ». Des peurs, Maria en a peu. Celle de vieillir ? Elle éclate de rire, « que j’aie peur ou pas, l’âge avance tout seul ». Des envies et des projets, en revanche, elle en a comme une femme qui continue, dans cette carrière de comédienne qu’elle a embrassée dès l’adolescence, et même avant, quand, à sept ans déjà, elle interprétait le personnage de Barbe bleue, dans les pièces qu’elle créait avec ses cousins. « On a tous tout en nous, sur scène, je veux donc tout jouer. Après, dans la vie, on devrait choisir qui on veut être ou ne pas être, même si parfois il y a des comportements qui nous échappent, parce qu’il y a une impulsivité qu’on maîtrise plus ou moins bien. »

Maria Mettral

1985 Naissance de son fils, Sébastien, le 1er décembre, jour de son anniversaire. Suivront Lola (1995) et Noah (2001).
1992 Perte de son premier fils, Hugo.
1984 Son premier grand rôle à 24 ans : La mouette de Tchekhov dans une mise en scène d’André Steiger.
17 mai 2003 Mort de son père.
2013 Sortie du CD, Malgré les apparences, écrit en collaboration avec Aliose
23 août 2023 Mort de sa mère.
Octobre 2023 Joue la Callas, alors qu’elle vient de perdre sa mère.
1985 Naissance de son fils, Sébastien, le 1er décembre, jour de son anniversaire. Suivront Lola (1995) et Noah (2001).
1992 Perte de son premier fils, Hugo.
1984 Son premier grand rôle à 24 ans : La mouette de Tchekhov dans une mise en scène d’André Steiger.
17 mai 2003 Mort de son père.
2013 Sortie du CD, Malgré les apparences, écrit en collaboration avec Aliose
23 août 2023 Mort de sa mère.
Octobre 2023 Joue la Callas, alors qu’elle vient de perdre sa mère.

Statue Padre Pio

Statue Padre Pio
PHOTO: Magali Girardin.

LA STATUE DE PADRE PIO

« C’est un clin d’œil à mon papa chéri, pas religieux du tout, puisqu’il avait même une forme d’aversion pour le catholicisme, mais Padre Pio, c’était autre chose, une humanité à l’œuvre. » Padre Pio était le défenseur des humbles, le doux, l’empathique. Tout le contraire de ceux qui ont forcé le père de Maria à porter pendant deux ans, sans interruption, la robe de bure de Saint Antoine, pour le guérir de son bégaiement. Il avait 7 ans. Il venait de perdre sa mère, un deuil qui avait déclenché ses troubles de la parole. La robe de bure, loin de le soigner, lui a attiré toutes sortes de moqueries, dans une Italie du Sud conservatrice et superstitieuse. « Une affreuse connerie, cette robe. » Mais le père de Maria n’était pas du genre à se lamenter sur son sort. Il a fait face, et a su rire lui-même de son bégaiement, devançant les autres. « Mon père était très élégant. » Dans la maison des parents, Padre Pio était omniprésent, sous forme d’images et de statuettes. « Il était comme un père spirituel pour mon papa, car le sien était âgé, un homme d’une autre époque. » 

LA PHOTO DE LA PIÈCE COUPLE OUVERT À DEUX BATTANTS

Elle trône dans la cuisine, comme d’autres de Christian et elle, lors de différents rôles à divers stades de leurs carrières. Couple ouvert à deux battants, des auteurs Franca Rame et Dario Fo, est l’histoire d’un couple qui cherche à se réinventer. Le mari propose d’ouvrir leur couple. L’épouse encaisse bien plus qu’elle n’approuve. Victime pendant la première partie de la pièce, elle inverse la tendance, sous les yeux du mari incrédule, puis jaloux. « C’est burlesque, à l’italienne, très années 70. » Est-ce que le couple qu’elle forme depuis 36 ans avec Christian Gregori se questionne ou se réinvente à mesure de rôles comme celui-ci ? « Non, on sait très bien dissocier. Moi, je ne suis pas du tout couple ouvert à tous vents. C’est déjà bien assez compliqué à deux. Je ne suis pas très jalouse de nature, mais je suis très impulsive. Je n’ai pas de crainte, en revanche, si j’assiste à quelque chose d’ambigu entre Christian et une autre, là je deviens très tigresse, ça ne va pas très bien se passer. » Christian est parti faire la sieste, après avoir retiré le collier de La Castou. Juste avant de se retirer, il a embrassé celle qu’il appelle tantôt Marie, tantôt Maria, comme si elle était toutes les femmes.

Pièce Couple ouvert à deux battants

Pièce Couple ouvert à deux battants
PHOTO: Magali Girardin.

Le collier de la Castou

Le collier de la Castou
PHOTO: Magali Girardin.

LE COLLIER DE LA CASTOU

Il s’agit du collier de la danseuse, comédienne et chanteuse La Castou, qui a choisi de partir avec Exit à la suite de douleurs devenues insupportables pour elle. Maria et elle se connaissaient depuis 35 ans, et sont devenues très proches lors du tournage de la série Bigoudi. La Castou faisait partie de la famille de Maria, devenant la marraine de son fils Noah. Elle l’a accompagnée jusqu’au bout de son voyage. « On aurait dit qu’elle partait en vacances, elle avait tout préparé. Elle m’a demandé de prendre des souvenirs d’elle, alors j’ai pris ce qui l’évoquait le plus pour moi. Ce collier, une bague. Un manteau, pour m’habiller d’elle. » Avant que Maria ne se laisse gagner par l’émotion, son mari Christian suspend le collier à son cou, sur son torse velu, et parade en dissertant sur la non-binarité. Chez eux, les larmes se concluent toujours par des rires.

LE LIVRE DE RICHARD BACH

Jonathan Livingston le goéland, de Richard Bach est un de ses livres fondateurs. Elle l’a reçu des parents d’un jeune élève à qui elle donnait des cours particuliers de français. Elle avait 14 ans, gagnait son argent de poche, et vivait une période mélancolique. Ce livre a été une leçon de vie. « C’est un ouvrage philosophico-initiatique dans la lignée du Prophète de Khalil Gibran ou du Petit Prince. Il faudrait le mettre entre les mains de tous les adolescents. À travers ce goéland, on apprend à entrer dans la vie. Je l’ai relu une vingtaine de fois au cours de mon existence. En plus, j’ai dans ce livre la photo de mon petit Guillaume. C’est un garçon qui jouait mon fils dans le film 15, rue des Bains de Nicolas Wadimoff, en 2000, alors que j’étais enceinte de Noah. Guillaume a eu une tumeur du cerveau pendant qu’on jouait. Cet enfant était un ange. C’est un ange. Sa photo est à sa juste place dans ce livre, lui aussi s’est envolé. »  

Le livre de Richard Bach

Le livre de Richard Bach
PHOTO: Magali Girardin

Huiles essentielles de Maria Mettral

Huiles essentielles de Maria Mettral
Photo : Magali Girardin.

SES HUILES ESSENTIELLES

Elles sont une façon pour elle de se soigner sans prendre d’entrée de jeu des médicaments allopathiques. « Ça fonctionne super bien ! » À portée de main, elle a toujours « du tea tree, pour tous les petits bobos, de la menthe poivrée pour la digestion, de la ravintsara, dès qu’on est un peu grippé, mais il ne faut pas dépasser les doses sinon ça peut être toxique ». Lors de ses rituels d’entrée en scène, elle se tamponne les poignets et le plexus solaire de laurier noble « pour déstresser » ou de petit grain bigarade et de marjolaine à coquille. « Mais je ne suis pas psychorigide, quand j’ai mal à la tête et que la menthe poivrée ne suffit pas, je prends un Dafalgan. » À leur guérisseuse bienaimée, ses enfants ont offert une sorte de bible des huiles essentielles, « je le compulse de manière exhaustive », sourit cette femme qui chérit tous les cadeaux de ses proches.  Et pour ses problèmes de sommeil, elle prend quoi ? « Ah, non, pour mes problèmes de sommeil, il faut que j’aille voir un gourou, plutôt, je crois », dit-elle dans un éclat de rire.

LA PIERRE D’ARTHUR

« C’est un cadeau de mon petit-fils de 15 ans, Arthur, qui adore également les pierres. Il l’a ramenée du Maroc et l’a achetée avec son argent de poche. Il sait à quel point j’aime les pierres, les minéraux, les prendre dans ma main, les toucher, contempler leur structure et leurs couleurs si variées, c’est un lien profond à la terre. J’en ai de toutes sortes, par exemple, cette labradorite qui est une pierre de protection, qui éloigne les mauvaises ondes. Elle ancre. » Des pierres, Maria en ramène à chacun de ses voyages. Elle possède un petit bout de bois pétrifié ramené de Patagonie. Une pierre volcanique ramenée d’une excursion sur l’Etna. Une moldavite qui vient de la République tchèque, achetée une petite fortune dans un de ses magasins préférés à Lausanne. La Moldavite serait née à la suite de l’impact d’une météorite, il y a 20 millions d’années dans le sud de la Bohème. « Je suis très compulsive dans l’achat des pierres », admet Maria en caressant sa labradorite.

Pierre d’Arthur

Pierre d'Arthur
PHOTO: Magali Girardin