Jain Retrouver l’équilibre

Oubliez la petite robe noire et blanche à col Claudine ou l’uniforme bleu roi avec ses épaulettes rouges ! Jain les a rangés au fond de son armoire. Avec son troisième album, The Fool, elle a choisi de nous emmener dans un voyage interstellaire, pour danser sur la lune et planer autour de Vénus, piochant allègrement dans l’imagerie des seventies pour bâtir ce monde poétique et chamarré. Cinq ans après la sortie de Souldier, la Toulousaine revient (enfin) aux affaires. Reposée. Impatiente de retrouver ce public à qui elle avait fini par poser un lapin, en 2019, quand, harassée par quatre ans de tournée et 320 concerts, elle décida de tirer la prise et de prendre du recul. Aujourd’hui, elle se glisse volontiers dans la peau du fou, le personnage central de cet album, première carte du tarot marseillais : en quête de sens, elle marche vers son avenir, vers un nouveau départ, forte d’un équilibre retrouvé.

OFF : Le tarot marseillais sert de fil rouge à cet album. Pourquoi ?
Jain : Parce qu’il fait partie de mes souvenirs d’enfance. Ma mère avait pris l’habitude de nous tirer les cartes, à mes sœurs et moi. Je ne crois pas à la divination en tant que telle, mais ces moments de joie et de rires font partie de moi et de mon histoire. C’est ce lien familial que j’ai voulu partager.

OFF : Chaque chanson correspond à une des cartes du tarot. Or, il y a 11 titres et 21 arcanes… Comment les avez-vous sélectionnées ?
Jain : Si j’avais déjà écrit les paroles, je regardais à quelle carte je pouvais les relier. Mais il m’est aussi arrivé de partir d’une carte et de réfléchir à la façon d’écrire son histoire… Chaque carte possède une double lecture. Le soleil représente l’épanouissement, la lune, c’est la solitude, la nostalgie… C’est hyperpoétique comme univers. Ce qui me plaît, c’est la symbolique autour de ce jeu, son côté mystique. Beaucoup d’artistes l’ont utilisé dans leurs œuvres, comme Salvador Dali, André Breton ou Stephen King.

OFF : Autre source d’inspiration : les vinyles des années 70. Une raison particulière ?
Jain : Pendant le confinement, j’ai écouté beaucoup de disques de cette période. Ils appartenaient à mes parents… J’ai découvert Ziggy Stardust, Kate Bush, Stevie Nicks, Prince, Ricky Lee Jones, et je m’en suis imprégnée pour cet album. J’avais envie d’aller vers quelque chose de plus planant, moins terrien que les deux premiers.

OFF : Vous avez dessiné la pochette de l’album, ainsi que les onze cartes de tarot qui l’accompagnent. Le dessin est-il important dans votre vie ?
Jain : En fait, j’ai commencé par ça, bien avant la musique… J’avais suivi une école préparatoire en arts à Paris et, petite, je rêvais déjà de dessiner des prochettes d’albums. La musique me permet désormais de réunir ces deux univers.

OFF : Vous avez même profité de votre pause pour collaborer avec des marques…
Jain : Oui, j’adore ça ! J’avais pris l’habitude de poster des dessins ou des peintures sur les réseaux sociaux. Et quelques marques comme Agnès B ou Monoprix m’ont proposé des collaborations… On m’a même confié l’habillage graphique de France 2 pendant un été. C’est chouette de sortir du cadre de la musique, c’est un peu ma cour de récré.

OFF : Comment aviez-vous abordé cette pause en 2019 : déprimée ou soulagée ? 
Jain : Franchement, cela m’a fait un bien fou de me retrouver toute seule, chez moi. J’étais contente d’arrêter, de souffler, de passer du temps avec ma famille, de vivre tout simplement sans penser à la prochaine date de tournée. Cela m’a aussi permis de réaliser tout le chemin parcouru.

OFF : Et quel regard portez-vous aujourd’hui sur ce chemin-là ?
Jain : Je suis fière d’avoir accompli tout ça et de savoir que des titres comme Makeba font partie de la vie des gens.Pendant plus de quatre ans, j’étais rarement dans le moment présent, plus dans l’anticipation. Je me sentais dans la peau de ce funambule qui tente tant bien que mal de garder son équilibre… Prendre du recul a donc été particulièrement essentiel et inspirant.

« The Fool », Jain. Columbia/Sony Music.
Jain sera en concert le jeudi 20 juillet à Paléo.